Une salariée est engagée par une entreprise de nettoyage et affectée à l’entretien d’un hôtel en qualité de femme de chambre. Mais, en litige avec son employeur, elle va considérer qu’elle est, en réalité, victime d’un prêt de main-d’œuvre illicite…et réclamer des dommages-intérêts. Avec quelles chances de succès ?
Le prêt de main-d’œuvre illicite répond à des critères (très) précis
Une salariée a été engagée en qualité d’agent de service par une entreprise de nettoyage, dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée (soumis à la convention collective nationale des entreprises de propreté), son lieu d’affectation étant alors un hôtel.
Licenciée pour faute grave, elle réclame des dommages-intérêts au motif qu’elle s’estime victime d’un prêt de main-d’œuvre illicite.
Le prêt de main-d’œuvre illicite est caractérisé si la convention a pour objet la fourniture de main-d’œuvre moyennant rémunération pour faire exécuter une tâche permanente de l’entreprise utilisatrice sans transmission d’un savoir-faire ou mise en œuvre d’une technicité qui relève de la spécificité propre de l’entreprise prêteuse.
Et c’est ce qui se passe ici, estime la salariée : son activité de femme de chambre relève de l’activité normale et permanente de l’hôtel et sa prestation relevait d’une technicité spécifique qui, d’après elle, aurait pu être confiée à un salarié de l’hôtel.
Ce que conteste l’entreprise : l’activité de nettoyage est une activité support de celle de l’hôtellerie que la société exploitant l’hôtel avait décidé d’externaliser en la confiant à une société spécialisée dans l’activité de nettoyage des hôtels de luxe et palaces.
Aucun lien de subordination n’est ici établi, ajoute-t-elle, entre l’hôtel et la salariée de l’entreprise de nettoyage, même si elle reçoit des consignes et directives à respecter, des plannings établis en fonction de l’occupation des chambres et si l’hôtel exerce un contrôle de la qualité de la prestation effectuée par la salariée de l’entreprise de nettoyage, tenue d’une obligation de résultat.
Ce que confirme le juge qui constate que :
- l’hôtel a choisi de confier l’activité de nettoyage à une société de nettoyage spécialisée dans l’activité de nettoyage des hôtels de luxe et palaces et ayant un savoir-faire spécifique dans ce domaine ;
- un contrat de prestations de service a été mis en place prévoyant que la prestataire s’engageait à fournir et exécuter les prestations de nettoyage des chambres et des lieux publics de l’hôtel par un personnel qualifié, en fournissant les produits et le matériel nécessaires ;
- ce contrat précise que le prestataire assure une permanence d’encadrement et assume l’entière responsabilité du recrutement et de l’administration de son personnel, ainsi que de manière générale, de toutes les obligations qui lui incombent en qualité d’employeur.
En conclusion, externaliser des missions en les confiant à un prestataire ne caractérise pas un prêt de main-d’œuvre illicite, sous réserve tout de même de prendre quelques précautions…
Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 4 mars 2020, n° 18-10636
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