La nouvelle Loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire a été publiée le 12 mai 2020. Elle aménage notamment les pouvoirs du gouvernement et les mesures de quarantaine et d’isolement en période d’urgence sanitaire : tour d’horizon de ce qu’il faut retenir.
Coronavirus (COVID-19) : prorogation de l’état d’urgence sanitaire
L’état d’urgence sanitaire, qui avait été déclaré à compter du 24 mars 2020 pour une durée initiale de 2 mois, est prorogé jusqu’au 10 juillet 2020.
Coronavirus (COVID-19) : répression des délits et état d’urgence
Pour rappel, tout délit ou crime n’existe que si son auteur avait l’intention de le commettre : cela s’appelle « l’élément moral » de l’infraction, c’est-à-dire la volonté sans équivoque de son auteur de commettre l’infraction pour laquelle il est poursuivi.
En matière de crime et délit, la preuve de cet élément moral est déterminante : si l’intention de l’auteur de commettre l’infraction n’est pas apportée, il n’y a pas de crime ou de délit.
Une particularité existe toutefois concernant les délits : une personne qui a commis une faute d’imprudence, de négligence ou qui a manqué à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement peut être poursuivie, s’il est prouvé qu’elle n’a pas accompli les diligences normales qu’elle aurait dû faire au regard de ses missions ou de ses fonctions, ou du pouvoir et des moyens dont elle disposait.
Dans ce cas, la personne qui a créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage peut être poursuivie, même si elle n’a pas souhaité commettre d’infraction.
La nouvelle Loi prorogeant l’état d’urgence apporte une précision importante concernant l’appréciation d’une telle situation en période d’urgence.
Elle précise en effet que ces dispositions doivent être appréciées, en période d’état d’urgence sanitaire, en tenant compte du pouvoir et des moyens dont disposait l’auteur des faits dans la situation de crise, ainsi que de ses missions ou de ses fonctions, notamment en tant qu’autorité locale ou employeur.
Reste à savoir comment se positionneront les juges concernant ce nouveau critère.
Coronavirus (COVID-19) : aménagement des pouvoirs du gouvernement
Dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, le Premier ministre dispose d’un certain nombre de pouvoirs afin de garantir la santé publique.
Certains d’entre eux viennent d’être aménagés.
Jusqu’à présent, dans le cas de la déclaration d’un état d’urgence sanitaire, le Premier Ministre pouvait restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par décret.
A compter du 12 mai 2020, il peut aussi réglementer l’accès aux moyens de transport et les conditions de leur usage.
Jusqu’à présent, il pouvait également ordonner la fermeture provisoire d’une ou plusieurs catégorie(s) d’établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, à l’exception des établissements fournissant des biens ou des services de première nécessité.
A compter du 12 mai, il peut aussi règlementer l’ouverture, y compris les conditions d’accès et de présence, de certaines établissements recevant du public, toujours en garantissant l’accès des personnes aux biens et services de première nécessité.
Jusqu’à présent, le Premier Ministre pouvait ordonner la réquisition de tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire ainsi que de toute personne nécessaire au fonctionnement de ces services ou à l’usage de ces biens.
Désormais, il peut ordonner la réquisition de toute personne et de tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire.
Coronavirus (COVID-19) : concernant la quarantaine et l’isolement
- Personnes visées par les mesures de quarantaine et d’isolement
Les mesures de quarantaine et d’isolement ne peuvent viser que les personnes qui entrent sur le territoire national, en Corse ou dans les collectivités d’Outre-mer (la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles Wallis et Futuna et la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie, les Terres australes et antarctiques françaises et de Clipperton) après avoir séjourné au cours du mois précédent dans une zone de circulation de l’infection.
La liste des zones du circulation de l’infection est fixée par arrêté (non encore publié à ce jour) et fait l’objet d’une information publique régulière pendant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire.
- Conditions de déroulement des mesures de quarantaine et d’isolement
Les mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement peuvent se dérouler, au choix des personnes concernées, à leur domicile ou dans des lieux d’hébergement adaptés.
La durée de ces mesures ne peut excéder quatorze jours. Elles peuvent être renouvelées, dans la limite d’une durée maximale d’un mois.
Dans le cadre des mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement, il peut être fait obligation à la personne qui en fait l’objet de :
- ○ ne pas sortir de son domicile ou du lieu d’hébergement où est exécutée la mesure, sauf pour les déplacements spécifiquement autorisés par l’autorité administrative. Si un isolement complet de la personne est prononcé, celle-ci doit cependant avoir accès aux biens et services de première nécessité ainsi qu’à des moyens de communication téléphonique et électronique lui permettant de communiquer librement avec l’extérieur ;
- ○ ne pas fréquenter certains lieux ou catégories de lieux.
Dès lors que l’état de santé de l’intéressé le permet, il peut être mis fin à ces mesures.
Notez qu’un décret (non encore paru à ce jour) doit préciser les conditions dans lesquelles sont assurés l’information régulière de la personne qui fait l’objet de ces mesures, la poursuite de la vie familiale, la prise en compte de la situation des mineurs, le suivi médical qui accompagne ces mesures et les caractéristiques des lieux d’hébergement.
- Concernant les victimes de violences intra familiales
Les personnes et enfants victimes des violences ne peuvent pas :
- ○ être mis en quarantaine, placés et maintenus en isolement dans le même logement ou lieu d’hébergement que l’auteur des violences ;
- ○ être amenés à cohabiter avec l’auteur des violences lorsque celui-ci est mis en quarantaine, placé ou maintenu en isolement, même si les violences ne sont qu’alléguées.
Si l’auteur des violences ne peut pas être évincé du logement conjugal ou dans l’attente d’une décision judiciaire statuant sur les faits de violence allégués, le relogement des personnes et enfants victimes de violences doit être assuré dans un lieu d’hébergement adapté.
Lorsqu’une décision de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement est susceptible de mettre en danger une ou plusieurs personnes, le préfet doit en informer sans délai le procureur de la République.
- Communication des données relatives aux passagers par les transporteurs
Lorsque le préfet du département le demande, les entreprises de transport ferroviaire, maritime ou aérien doivent lui communiquer les données relatives aux passagers et à leurs déplacements.
Cette communication doit uniquement servir à assurer la mise en place des mesures de quarantaine et d’isolement des personnes ayant séjourné pendant un mois dans une zone infectée avant leur entrée sur le territoire français ou les collectivités d’outre-mer.
Cette communication s’effectue sous conditions, qui doivent être fixées par décret (non encore paru à ce jour) en fonction de la nature et des modes de propagation du virus, après avis du comité scientifique qui est nommé en cas de déclaration de l’état d’urgence sanitaire.
L’ensemble de ces mesures est applicable à compter du 12 mai 2020.
Source : Loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions (articles 3 et 4)
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